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Homélie du 26 janvier 2020

HOMELIE   DU  26  JANVIER     (1Corinthiens 1,10-13.17. Matthieu 4,12-23)

Cette messe de la Saint Vincent est dite avec des vignerons et d’autres personnes qui n’ont pas l’habitude de venir à la messe et même qui peuvent y être totalement opposés. Sachez que tous vous êtes totalement respectés dans vos choix ou non choix ! Ce respect ne nous amène pas nécessairement au silence, nous pouvons très bien faire ensemble un petit bout de chemin dans la réflexion sur nos vies, et c’est ce que je vous propose à partir des textes qu’on vient d’entendre.

Le texte de Saint Paul est facile à actualiser (peut-être un peu trop !) : « J’ai appris qu’il y avait entre vous des rivalités ! » commence par dire Saint Paul ! C’est vrai que ce matin, tous les vignerons ne sont pas présents et que la concurrence peut amener certaines petites dissensions : la solidarité n’est pas toujours facile : C’est ce que Paul constate au sein même de ‘Eglise qui est à Corinthe. Certains se réclament de disciples différents : Apollos, Pierre, Paul ou au Christ. Paul remet les pendules à l’heure en partant de son cas précis : « Est-ce Paul qui a été crucifié pour vous ? Est-ce au nom de Paul que vous avez été baptisés etc… » Paul se renvoie à davantage d’humilité dans son rôle, dans sa mission… C’est important pour nous tous, cette humilité qui peut assainir nos relations entre nous ! On est les cadors de personne

Je voudrais m’arrêter davantage sur l’évangile, ce texte pourrait nous apprendre à regarder, à relire les évènements de la vie, de nos vies, pour y trouver tout un sens : Jésus apprend que le roi Hérode vient de jeter Jean Baptiste en prison et il craint qu’il ne manque pas de lui faire subir le même sort. D’où son but, c’est de quitter la Judée et donc Jérusalem, lieu pourtant idéal pour annoncer la Bonne Nouvelle, (quand même Jérusalem, avec son temple ! c’est le lieu par excellence de la religion juive) mais cette région se trouve sous le pouvoir d’Hérode. C’est pour cela qu’il part en Galilée et plus précisément à Capharnaüm, ville qui porte bien son nom, ouverte à tous les peuples, les religions, les mœurs, en un mot  le carrefour des  nations païennes et juives. Et c’est là qu’il va découvrir et annoncer que la Bonne Nouvelle n’est pas réservée aux seuls juifs mais à l’humanité toute entière. On peut dire que c’est grâce à Hérode, à la peur de Jésus d’être arrêté, que ce dernier va découvrir à travers cette « populace » de Capharnaüm ouverte  à toutes les nations que sa mission, que cette annonce d’un Dieu qui aime n’est pas réservée aux juifs mais à l’humanité toute entière. Quelle révolution ! Mais pour accueillir ce coup dur et le vivre comme quelque chose de positif, il faut tout une mentalité, un état d’esprit. Face à cette difficulté majeure pour Jésus, nous comment aurions-nous réagi ? Il y aurait surement du découragement, face à cette impossibilité d’annoncer la Bonne Nouvelle à Jérusalem et en particuliers au Temple, on aurait eu envie de laisser tomber, d’en vouloir à Hérode de l’empêcher de vivre ce qui lui paraissait le meilleur pour sa mission, en tous les cas surement pas comme une chance qui permet de voir plus clair et donc de remettre en cause les fondements mêmes de sa Foi : Passer de la Bonne Nouvelle pour le seul peuple juif (rappelons-nous, peuple élu, race choisie !) à la découverte grâce à cet exil forcé à Capharnaüm que cette Bonne Nouvelle était pour le monde entier…

Hier soir, c’était les vœux de la commune de Saint Maurice, c’est toujours l’occasion, d’échanges de discussions avec des personnes qu’on rencontre moins et avec certains qui ne connaissent de moi que le fait que je sois curé, inévitablement reviennent toutes les histoires qui empoisonnent l’Eglise aujourd’hui… Fort de cette réflexion que nous venons de faire par rapport à l’évangile d’aujourd’hui, c’est un peu de la même manière que je regarde ce qu’est l’Eglise aujourd’hui (qu’elle était d’ailleurs aussi autrefois), par rapport à toutes ces histoires cachées de pédophilie et d’autres réalités non respectueuses des personnes. Je pourrais regarder toutes ces choses en désespérant de l’Eglise et en ayant envie de la quitter. Ce n’est pas ma réflexion ; bien sûr j’aurais envie que l’Eglise, en un mot,  soit fidèle à Jésus Christ. Mais après réflexion, je me dis : « Mais si l’Eglise était vraiment fidèle à Jésus Christ, dans sa manière d’aimer tout un chacun avec le souci des plus fragiles des plus pauvres…. Je me connais, je défendrais inévitablement et exclusivement ma boutique, la montrant comme la meilleure et je ne respecterais plus du tous les autres, je ne m’enrichirais plus de ce que sont les autres dans leurs différences, puisque je détiendrais la vérité… » Donc j’ose dire, même si cela me fait souffrir bien sûr : « Heureusement que l’Eglise est tordue, cela me permet d’être vraiment à l’écoute, au respect de l’autre dans sa différence et surtout de ne pas chercher à défendre par tous les moyens ma « boutique », y compris l’indéfendable ! » ça change quand même toutes nos relations avec les autres et c’est drôlement heureux pour tous.

Daniel Bertèche