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Homélie du 15 août 2019

HOMELIE   DU  15  AOUT    (Luc 1,39-56)

Nous célébrons aujourd’hui l’Assomption de Marie, c’est-à-dire de Marie dans sa gloire… Et là, il y a toujours une confusion à éviter, c’est de considérer Marie comme une demi-déesse, vénérée et reconnue dans toutes ces statues qui la représente en reine et donc bien au-dessus des autres femmes. C’est un danger à éviter pour différentes raisons  Par exemple, il est bien connu que quand on idolâtre un membre d’un groupe, on a du mal à respecter vraiment les autres. J’ai déjà remarqué que des personnes qui avaient un culte « très fort » pour Marie (ou plutôt la Sainte Vierge comme ils l’appellent) n’étaient pas toujours respectueux pour les autres femmes. On l’idolâtre et par là on la rend inhumaine, c’est à dire pas comme nous… Et si elle n’est pas comme nous, elle ne peut pas nous éclairer puisqu’elle est au-dessus de nous, ailleurs….

Et pourtant, c’est tout le contraire que l’on trouve dans l’évangile, à commencer par celui que nous venons d’entendre : Luc nous raconte qu’ « en ces jours-là, Marie se mit en route et se rendit vers la région montagneuse, dans une ville de Judée… » Elle va rendre visite à sa cousine Elisabeth car elle vient d’apprendre qu’elle est enceinte de 6 mois. Elle va, comme cela se faisait beaucoup à l’époque, accompagner sa cousine et l’aider jusqu’à la naissance…C’est la manière de vivre de toute jeune fille quand une naissance s’annonçait dans une famille. Rien d’original donc…Mais j’ai laissé de côté volontairement deux mots de ce début d’évangile : Marie se met en route « avec empressement » ! Mais pourquoi avec empressement ? Il n’y a aucune raison ! Il reste encore trois mois avant la naissance de Jean Baptiste,  il n’y a pas d’urgence… Donc cet empressement vient d’ailleurs. Dans le texte qui précède celui que nous venons d’entendre, l’ange a demandé à Marie si elle acceptait d’être la mère de Jésus, avec toutes les conséquences qu’elle pressent, les difficultés, comment cette vie qu’elle s’imaginait toute simple va être profondément bousculée, perturbée… Et l’ange lui a appris que sa cousine très âgée, celle qu’on appelait la « stérile » va avoir un enfant. Apprenant qu’Elisabeth était en train de vivre une vie marginale, pas comme les autres, un peu comme elle, elle a hâte de partager avec sa cousine, d’échanger pour y voir un peu plus clair, en étant sûr que dans sa situation « particulière », Elisabeth était très bien placée pour la comprendre. Et on connaît la suite : Elisabeth va conforter Marie dans son choix, lui dire toute son admiration, son bonheur (soutenue par son fils !) de ce qu’elle a fait. D’où l’explosion de bonheur de Marie exprimée dans le Magnificat. Quelle belle rencontre, qui n’a pu être vécue que par le partage d’une humanité  tout à fait commune…

C’est important de se rappeler que c’est par des partages d’expériences humaines que nous pouvons nous aider à vivre… C’est aussi dans les réactions bien humaines de Marie qu’elle peut nous éclairer dans sa réflexion. Je ne prendrai que quelques exemples : Quand Jésus a eu 12 ans, il est resté au temple sans prévenir ses parents et quand avec Joseph, elle l’a retrouvé, sa réflexion : « Mon enfant, pourquoi nous as-tu fait cela ? Vois comme ton père et moi, nous avons souffert en te cherchant ! » Ce n’est pas une réaction de maman, cela ? Et en plus elle n’a pas compris la réponse de Jésus… Mais « Marie retenait tous ces événements et les méditait dans son cœur », en pensant qu’elle comprendrait… plus tard. Quel éclairage elle nous donne !

Au moment des noces de Cana, Marie toute attentive s’aperçoit qu’ils manquent de vin et le signale à Jésus. La réponse de Jésus peut paraître terrible : « Femme que me veux-tu, mon heure n’est pas encore venue ! »  Marie ne se sent pas blessée du tout, au contraire, elle encourage les serviteurs à faire ce que Jésus leur commandera, et elle aura raison…Là aussi, qu’est-ce qu’elle nous éclaire encore à ne pas nous sentir tout de suite attaqué !

Un petit fait éclairé par Marie ! Dimanche j’ai baptisé deux enfants… J’avais été prévenu qu’il n’y aurait pas de parrain, ni marraine ! A la préparation, le papa est arrivé après sa sieste et donc n’a pas participé du tout à la discussion. Au baptême, la maman avait super bien préparé le baptême allant de la Bible jusqu’à Dostoïevski ! Moi, qui ne suis plus très physionomiste, au moment de signer les registres, j’appelle le papa ; j’ai pris un autre homme pour le papa alors qu’il n’était pas là… Ils vont le chercher (ils habitent tout près de l’église !) il revient et je lui dis qu’il n’était pas obligé de signer. Il n’a pas signé. A la fin, une femme très en colère vient vers moi et me dit : « J’ai 100 ans, et c’est la première fois de ma vie que je vois un baptême sans parrain, ni marraine ! » Je lui ai simplement répondu : « Moi aussi, madame ! » Et on s’est quitté là-dessus. J’avoue franchement que j’en suis encore à « retenir cet évènement et à le méditer dans mon cœur ! » Je soupçonne beaucoup de souffrances de tous les côtés et mon seul but, ça a été de ne pas en rajouter. J’ai simplement proposé qu’on pouvait se revoir. A suivre donc…

Daniel Bertèche