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Homélie du 2 décembre 2018

  HOMELIE   DU  2  DECEMBRE     (Luc 21,25-28.34-36)

Ce dimanche, nous avons encore le droit à un langage apocalyptique avec « des signes dans le soleil et les étoiles… le fracas de la mer et des flots…. Les hommes qui meurent de peur etc… » C’est une manière imagée de brosser un tableau de la vie du monde, des évènements etc, en constatant et en concluant que c’est vraiment catastrophique ce qui arrive. Ce regard de la réalité pour notre monde d’aujourd’hui, il nous arrive aussi de l’avoir, surtout quand  on arrive à un certain âge. Vendredi soir, nous nous sommes retrouvés pour notre rencontre trimestrielle de réflexion au niveau de la paroisse que nous commençons toujours par une réflexion à partir de l’évangile… Comme notre évêque était venu partager notre réflexion, et pour lui laisser de la place, nous avons raccourci ce temps de réflexion et n’avons réfléchi que sur les deux premières lectures. Pour faciliter cette réflexion nous nous retrouvons en petits groupes : Je me suis retrouvé avec un groupe d’ « anciens » (j’étais le plus jeune, à bientôt 75 ans, ça laisse deviner l’âge des autres !) . Immédiatement notre discussion a pris une tournure « apocalyptique » dans la fausse acceptation du terme : Tout va mal… Il n’y a plus de morale…. Plus de respect…Cela va être la révolution, la guerre civile (les gilets jaunes !)… Et il n’y a plus personne à la messe… Quand on sera mort, il ne restera plus rien… Mais c’est catastrophique.

J’ai alors commencé par raconter un vieux souvenir que je rapporte souvent car il m’a beaucoup marqué : C’était quelques jours avant que je ne sois ordonné prêtre, je rencontre un bon vieux prêtre que j’aimais beaucoup. Celui-ci avec une certaine nostalgie et beaucoup de sincérité me dit : « Tu sais, je préfère être à ma place qu’à la tienne… Quand on voit où va le monde, ça ne va pas être facile pour vous ! » Je me suis toujours juré de ne jamais employer cette expression quand je serai devenu vieux prêtre et j’essaye de m’y tenir mais pas toujours avec succès. Et c’est là que la réflexion de Jésus peut drôlement nous éclairer quand il nous répète : «  Quand ces événement commenceront, redressez-vous et relevez la tête… Restez éveillés et tenez-vous debout devant le Fils de l’homme ! »

C’est alors qu’un des  « anciens » avance dans sa réflexion : « Quand même si on se rappelle comment était la religion dans notre enfance et notre jeunesse, comment c’était sévère, on ne parlait que de péché, d’un Dieu juge, qui nous condamnait si on agissait mal… Maintenant, ce que vous nous avez fait découvrir, et c’est drôlement bien, on nous parle d’un Dieu bon, qui veut notre bonheur etc… Pourtant je ne comprends pas que ça n’attire pas plus les jeunes aujourd’hui ! Où ils sont les jeunes ? »

Cette dernière réflexion, en lien avec cette découverte d’un Dieu qui aime gratuitement, nous a permis de nous redresser, de relever la tête pour regarder, voir et admirer tout ce que vivent de beau les jeunes là où ils sont aujourd’hui. Je leur ai raconté ma joie de voir « fonctionner » les jeunes de l’hospitalité à Lourdes… Mon admiration pour la « générosité » des animateurs-salariés du Secours Catholique dans notre délégation… Certains ont continué en parlant de leurs petits enfants qui vivaient de belles choses « malgré qu’ils n’allaient pas à la messe ! » Mais ce qui m’a le plus frappé, c’est comment leur comportement, leur attitude, leur visage même a changé, il y a eu sur leur visage comme une transfiguration. Avec beaucoup de sincérité, parfois avec des larmes dans les yeux (même les hommes), ils ont osé parler d’eux, de leurs propres questions, de leur souffrance, ils étaient comme libérés… Je ne peux pas entrer dans les détails… A plusieurs reprises, j’ai dû leur dire qu’il était temps de rejoindre le grand groupe, qu’on était déjà en retard, ils repartaient de plus belle tellement heureux de la possibilité de ce partage où chacun osait se dire dans un certain climat d’amitié. Conclusion, nous sommes arrivés bons derniers dans le grand groupe mais avec une grande sérénité au fond du cœur.

Et c’est là que dans ma réflexion, j’ai compris et rejoint la parole du prophète Jérémie, dans la première lecture. Celui-ci qu’habituellement on catalogue comme un pleurnichard, qui se sent toujours persécuté, qui reproche à tous (et même à Dieu) leur comportement qu’il considère comme injustes et qui là ose nous dire, alors qu’à première vue tout va mal, cette Parole venant de Dieu : « Voici venir des jours où j’accomplirai la parole de bonheur promise… » Alors que la soirée de réflexion avec l’évêque a été très riche, très éclairante, où vraiment chacun a pu se révéler avec ses divergences et qui aurait pu provoquer bien des commentaires et des réflexions profondes… Sans du tout renier le reste, c’est ce petit partage d’anciens, dans l’inattendu, qui a surtout retenu mon attention et profondément réjoui… J’y ai reconnu que tout ce temps de l’avent et même toute la fête de Noël bien  présents dans la  cette réflexion et dans ce partage !

 

Daniel Bertèche