Paroisses
Denier
Années de l'Appel

Homélie du 13 mai

  HOMELIE   DU  13  MAI        (Actes 1,15-17.20a-26. 1Jean 4,11-16. Jean 17,11-19)

Je vais d’abord reprendre deux phrases de la première lettre de Saint Jean qui éclairent les deux autres textes et aussi, bien sûr mon regard sur la vie. :
« Puisque Dieu nous a tellement aimés, nous devons, nous aussi, nous aimer les uns les autres… »
« Dieu est amour : qui demeure dans l’amour demeure en Dieu et Dieu demeure en lui. »
La première citation, je la retraduirais autrement : « Parce que Dieu nous a tellement aimé, nous pouvons, nous aussi nous aimer les uns les autres… »
Et c’est vrai qu’être habité par cette certitude que Dieu nous aime tellement nous permet nous aussi en pleine vie de faire passer cet amour avant tout.
Et c’est tout le sens de l’attitude de Pierre dans sa manière de parler de Judas :
« Ce Judas était l’un de nous et avait reçu sa part de notre ministère… »
L’amour de Dieu est marqué d’abord  par la liberté laissée à toute personne, y compris de le rejeter ! Et cette gratuité de l’amour de Dieu, Pierre va la proposer aux disciples de Jésus en demandant non de voter pour le meilleur mais qu’on tire au sort le remplaçant de Judas comme apôtre. Il n’est pas demandé aux candidats de la vertu, une conduite irréprochable, même pas des références quant à leur foi etc… La seule chose que Pierre demande c’est que ce soit des personnes qui ont été témoins de la vie publique de Jésus et c’est tout.
Je crois que cela a de l’importance dans notre manière de regarder les autres non pas à partir d’un jugement sur leur bonne ou mauvaise conduite mais tout simplement, comme à nous, en tenant compte de leur humanité.
N’oublions pas la réaction de Pierre face à Corneille qui se met à genoux : « Relève-toi, je ne suis qu’un homme moi aussi ! » Si on part de ce point de vue, de cette reconnaissance de notre humanité, cela change beaucoup de choses…

Ce samedi, je fais un mariage dans un des villages… J’ai vu les mariés, il y a à peu près deux mois pour préparer le dossier administratif et ils sont repartis avec le livret pour préparer concrètement le mariage et prévoir comment ils voulaient vivre ce mariage… Et pour cela, ils devaient prendre rendez-vous pour qu’on se revoie…. Depuis silence radio ! Alors ce lundi matin, je cherche à les joindre, ils n’ont pas de fixe, j’essaye avec l’intermédiaire des parents qu’heureusement je connais, ils sont sur liste rouge, alors je téléphone au grand père qui habite au même village que les parents, pour qu’il me donne le numéro de son fils. Le grand père ne se rappelait plus où il avait mis le numéro des parents mais il m’a promis d’aller leur dire… Ce qu’il a fait… Quelque temps plus tard, j’ai la maman qui me donne le numéro de portable de sa fille en me précisant qu’il ne faut l’appeler qu’après 14 h car avant elle dort, travaillant de nuit. Comme moi, j’avais une réunion en début d’après-midi à Metz, je n’ai pu l’appeler qu’après 17 h 30. Là, j’ai eu la future mariée qui m’a dit qu’elle allait m’appeler. Je propose un rendez-vous le soir même vers 19h15 chez eux, puisque après j’avais répétition de chants au même village à 20h15. C’est OK, le futur marié criant dans le téléphone : « Cela tombe bien on fait un barbecue avec des copains… » Ajoutant : « On ne s’en sort pas avec les préparatifs du mariage ! » A 19h15, je me pointe chez eux et effectivement je me trouve au milieu d’une dizaine de jeunes adultes avec quatre ou cinq enfants, je ne savais plus qui était qui, où était le futur marié etc… Tant bien que mal on a essayé de voir tout ce qu’il fallait, avec des changements de témoins qu’on avait oublié de prévenir, d’autres avec qui on n’est plus copains etc..  Et je suis reparti là-dessus (sans avoir eu une brochette, le feu de bois étant loin d’être réduit en braises !). Si je raconte tout cela par le détail, c’est pour que, vous qui me connaissez, vous imaginiez par quels états d’âme, j’ai pu passer !!!

Je vais les marier tout à l’heure, j’ai, en écrivant ces lignes, comme souci de bien les accueillir. Je reconnais qu’il y a en eux énormément de gentillesse mais une ignorance importante des choses de la Foi. Ils croient bien faire…

C’est important pour moi, reconnaissant ma propre humanité, d’accepter leur propre humanité, mais c’est surtout important de me rappeler que Dieu m’aime tellement qu’il me permet à mon tour d’aimer les autres et de vouloir leur bonheur avant tout. Et ce n’est possible (en tous les cas pour moi) de le vivre bien qu’en le partageant avec d’autres pour porter le regard même de Jésus sur ces personnes, en sachant reconnaître et en mettant en avant tout ce qu’il y a de beau dans la vie de ces jeunes qui sont, si on sait les voir, très attachants.
Mais en réagissant ainsi, je suis bien conscient que comme le dit Jésus : « Je ne suis pas du monde ! » c’est-à-dire : « Je ne fonctionne pas comme le monde… » (Combien de personnes m’ont dit : « Mais vous êtes bien trop bête ! »)  Et c’est vrai, mais je crois que ça vaut la peine. Et je me sens capable, à l’heure qu’il est, de leur faire un beau mariage.

Daniel Bertèche