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Homélie du 25 mars 2018

     HOMELIE   DU  25  MARS     (Marc 14,1-11. 15,37-47)

Habituellement en ce jour des Rameaux et de la Passion on lit le texte intégral de la Passion, texte assez long qui fait qu’on risque de se noyer dans les différents évènements et donc de tout survoler. Cette année, suite à une réflexion avec trois groupes, on a décidé de ne  réfléchir  qu’à partir du début et de la fin de ce texte de la Passion selon Saint Marc, c’est-à-dire du texte qu’on appelle l’onction à Béthanie et du texte qui commence au moment où Jésus est mort sur la croix.Le début de ce texte de la Passion nous montre déjà tout ce qui se met en place pour arrêter Jésus et le faire mourir, avec le rôle de Judas. Pendant que tout cela se prépare et se règle, Jésus est à Béthanie  chez Simon le lépreux. On a l’impression que ce qui va se passer là est pour Jésus comme un oasis au milieu du désert de la Passion : Et voilà que pendant qu’il était à table, entre une femme avec un flacon de parfum de très grande valeur (on nous donne le prix !) et elle lui verse ce parfum sur la tête. Les gens bien-pensants, immédiatement, avec des arguments irréfutables crient au scandale : « On aurait pu vendre le parfum  pour plus de trois cents pièces d’argent et avec le prix on aurait pu le donner aux pauvres… »  Et ils la rudoyaient. Et Jésus a cette réponse merveilleuse : « Laissez-là ! Pourquoi la tourmenter ? Il est beau, le geste qu’elle a fait envers moi… Ce qu’elle pouvait faire elle l’a fait… » Et il insiste : « Des pauvres, vous en aurez toujours mais moi, vous ne m’avez pas toujours… » Jésus se considère avec raison, à ce moment-là, comme un pauvre qui reçoit ce parfum comme un signe d’amour qui va pouvoir l’accompagner tout au long de la Passion où il va devoir affronter humiliations, rejets, abandons, souffrance et mort. C’est avec le parfum de cette femme qu’il va pouvoir vivre jusqu’au bout toute cette souffrance.

J’ai compris l’importance de l’attitude de cette femme pour Jésus qui va l’aider à tout bien vivre avec ce beau geste en mémoire, à travers ce que j’ai vécu un après-midi de cette semaine : J’ai eu la rencontre d’une jeune maman pour le baptême de son 3ème enfant.
Cette jeune femme qui n’est plus de mes villages, je l’ai connue au foot, j’ai su ses difficultés de jeunesse et comment son mari lui a redonné confiance, l’a transformée. Avec beaucoup de franchise, on a échangé sur tous ces sujets, ça a été un merveilleux partage qui m’a réjoui, où on a vu ensemble dans la simplicité toutes les richesses de vie bien présentes.
Après son départ, elle m’a laissé un sms : « J’ai passé un bon moment tout à l’heure merci… » Mais ça m’a donné des ailes, je nageais dans le bonheur.

Quelques heures après, est venu un couple de pauvres que je vais marier prochainement, nouvellement arrivé dans le secteur, ils ont trois enfants…
Rien n’est en règle… Ils ont tout mélangé au niveau des textes… Leur première question : C’est combien ça va coûter etc… Je résume : Tout pour me décourager devant ces « pauvres » si difficiles à accepter et à aimer. Je me suis surpris à les écouter, à les entendre, vraiment à leur faciliter la vie, en disant parce que c’était leur souci : Le mariage, c’est gratuit !.Ils ont été tellement heureux qu’à la fin la femme m’a dit : « On vous offrira une boîte de chocolat ! » Je sais que j’ai pu le vivre ainsi parce que j’étais encore sur mon petit nuage de ce que j’avais vécu précédemment.
Et j’ai compris combien le geste du parfum de cette femme pour Jésus l’a de la même manière accompagné tout au long de cette passion.

La deuxième partie que nous avons lue commence au moment de la mort de Jésus. Cette dernière partie habituellement (quand on lit tout le texte de la passion) on l’occulte, on y attache moins d’importance car on est un peu fatigué de tout ce qu’on a lu avant qu’on connaît déjà d’ailleurs !
Là, dans cette dernière partie, il n’est question que du centurion romain qui est le seul à poser un acte de Foi sur Jésus : « Vraiment cet homme était fils de Dieu ». On aurait pensé que c’était un apôtre ou un des disciples de Jésus qui aurait proclamé cela… Eh bien non, c’est un païen (même pas un croyant juif qui attend le messie), un occupant romain. Les apôtres sont absents, ils se sont sauvés !
On nous parle beaucoup des femmes qui sont là, certaines observent de loin, d’autres, Marie Madeleine et Marie mère de José repèrent l’endroit où on met le corps de Jésus. Mais elles sont là. Ce n’est pas elles qu’on attendrait, à cette époque le témoignage des femmes n’avaient pas grande valeur. Et il y a Joseph d’Arimathie, un homme important : membre du Conseil, un responsable pharisien, un homme courageux qui fait la démarche pour pouvoir récupérer le corps de Jésus.
Après avoir obtenu l’autorisation, l’évangéliste Marc nous dit : « Joseph acheta un linceul, descendit Jésus de la croix, l’enveloppa dans un linceul et le déposa dans un tombeau… et il roula une pierre contre l’entrée du tombeau. » Toute cette description détaillée (qui n’est pas dans l’habitude Marc) est là pour nous montrer combien Joseph prend soin du corps de Jésus. Ce corps qui a été humilié, blessé, tué est en quelque sorte réparé par l’attitude aimante de Joseph, un pharisien, ne l’oublions pas, qu’on n’attendrait pas dans cette attitude. Un centurion romain, des femmes, un pharisien, voilà les modèles proposés !

Et cette attitude de Simon , j’ai essayé de la vivre dans la rencontre d’une maman avec ses deux enfants. Elle m’explique rapidement sa situation : Séparée de son premier compagnon avec qui elle a eu une fille de 10 ans, Elle a vécu avec un autre compagnon avec qui elle a eu un gamin de 4 ans, compagnon dont elle vient de se séparer pour violences conjugales, elle est sous anti dépresseurs. Et les enfants chacun à sa manière étaient très excités. Tout le monde était pas mal cabossé… C’était un peu le corps mort de Jésus. Et j’avoue que je n’ai pas eu la délicatesse de Simon vis-à-vis d’eux. J’ai essayé, mais ça a été difficile.
Et le message que je reçois de Simon, aujourd’hui c’est celui-là : «  Si tu veux que des personnes revivent, ressuscitent, aime-les, pas par des mots, mais avec beaucoup de délicatesse, par des gestes tout simples, plein d’attention et de délicatesse, surtout en évitant de les cabosser plus qu’ils ne sont.. »

Daniel Bertèche