Paroisses
Denier
Années de l'Appel

Homélie du 1 mars 2020

HOMELIE   DU  1er   MARS  (Genèse 2,7-9 ; 3, 1-7. Matthieu 4, 1-11)

Pour un début de Carême, nous ne sommes guère gâtés : Pour ceux qui y sont sensibles, par une météo pas mal pourrie… Au cœur de l’Eglise par cette découverte toujours nouvelle, toujours plus inattendue, déconcertante et décourageante de scandales ou plutôt de souffrances… Et puis voilà que maintenant au niveau mondial un virus s’en mêle, qui au départ nous paraissait bien cloisonné et loin de nous et puis le voilà qui arrive près, tout près de nous. Il y a de quoi faire peur malgré tout….Tout va quand même très mal !

Avec les conséquences inévitables des oiseaux de malheur. J’ai eu au moins deux coups de téléphone de personnes me disant qu’elles avaient rencontrées des personnes qui leur avaient expliqué que c’était la punition de Dieu que c’était dans la Bible et que, comme c’était raconté, ça ressemblait tout à fait à ce qui se passait maintenant….. Que c’était important et de notre devoir d’en avertir les gens : Les hommes se conduisent tellement mal, Dieu en a assez et a décidé de les punir pour les ramener sur le droit chemin. Cette personne qui me racontait cela et y croyait dur comme fer, était  prête à aller prêcher sur les places avec toute sa fougue, sa générosité… Mais comme elle le fait souvent, surtout quand elle sent qu’elle est allée un peu loin, elle a conclu par cette question : « Et toi qu’est-ce que tu en penses ? » J’ai essayé de lui dire : « Si on croyait suffisamment que le seul but de Dieu, c’est notre vie, notre bonheur, notre liberté, on ferait confiance et c’est de bon cœur qu’on obéirait à sa loi d’amour. Si au contraire, et c’est ce que tu racontes, on est tenté de penser que Dieu ne nous veut pas que du bien… et on va même jusqu’à imaginer qu’il nous voudrait du mal ! » Cette femme a assez vite compris que sa manière de réagir n’avait rien à voir avec la réflexion qu’on menait ensemble sur cet amour gratuit de Dieu pour nous. C’est un peu tout le cheminement proposé à travers ce récit imagé de la création où l’homme, sans cess, doute de cet amour gratuit de Dieu et va jusqu’à faire de Dieu un concurrent…

Et c’est là que c’est intéressant de voir pourquoi et dans quel sens, dans ce récit des tentations, Jésus refuse un certain comportement pourtant bien plus efficace, en fait, tellement plus pratique pour communiquer son message. Refuser, pour Jésus, évite le porte à faux ; L’amour gratuit de Dieu est incompatible avec la force, la domination, l’avoir, le pouvoir et même le miraculeux…. Pourtant, c’est tentant…. Mais alors où est la liberté… Mais alors où est l’amour gratuit.

Cela entraîne de notre part une première réflexion ou plutôt une première remise en cause de notre manière de pensée : Plutôt que de trouver à redire à l’impression que nous avons de l’action de Dieu : on lui reproche que le monde est mal fait, que Dieu permet l’injustice, les évènements semblent donner raison à ceux qui pensent que Dieu se désintéresse des justes, mélange les bons et les mauvais etc… C’est perdre son temps et de l’énergie que de réagir comme cela. Arrêtons de remettre en cause Dieu, on est quand même gonflé de penser qu’il a mal fait sa création ! Arrêtons, il est beaucoup plus important de relire cette vie telle qu’elle est pour y découvrir, redécouvrir, re re découvrir tous ces signes de l’amour de Dieu pour nous que Jésus nous révèle concrètement si bien en refusant l’efficacité de la force, de la puissance, de la domination, de la punition ..

Ce matin, je reçois un coup de téléphone d’une personne dont je venais d’enterrer le cousin (mort à 65 ans) . Et elle avait envie de partager avec moi la richesse de vie de cet homme : Célibataire, ouvrier d’usine à la retraite, vivant avec sa mère et ses frères aussi célibataires. Un homme tout en discrétion, qui ne faisait jamais parler de lui. Qu’on pouvait tout à fait ignorer si on n’y faisait pas attention. Et pourtant un type généreux, toujours prêt à rendre service et ce dans les domaines les plus variés et les plus inattendus… Ce qui était frappant, et je l’ai vécu de la même manière avec d’autres personnes, les uns connaissaient des choses de sa richesse de vie que d’autres ignoraient et réciproquement, c’était extraordinaire. Et tout le monde parlait de cet homme avec plein de bonheur… J’ai vraiment trouvé que là, on était en plein dans le royaume de Dieu, on était en plein dans l’amour voulu par Jésus.  Pour nous ce carême, nous révèle ce visage d’un Dieu qui se montre à nous par les actes d’amour des plus humbles… Et que nous ne trouverons pas ailleurs….Surtout pas chez les plus forts, les plus bruyants, les plus puissants, les plus actifs…. Et on n’est jamais déçu. Cette découverte de ce visage de Dieu vis-à-vis de nous, nous invite et nous donne les moyens d’aimer un peu de la même manière, sans imposer et sans s’imposer… Nous pouvons nous souhaiter de rencontrer sur notre route des personnes comme cet homme humble qui nous mène à Jésus sur les chemins fleuris de notre carême

Daniel Bertèche