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Homélie du 30 septembre 2018

HOMELIE   DU  30   SEPTEMBRE     (Marc 9,38-43.45.47-48)

L’évangile d’aujourd’hui commence par une réaction de Jean (ce qui est rare, car ce n’est pas n’importe lequel des apôtres, c’est le fidèle parmi les fidèles). Il rapporte à Jésus qu’ils ont vu quelqu’un expulser les démons en son nom à lui. Bien sûr,  ils l’en ont empêché car cet homme ne fait pas partie des fidèles qui suivent Jésus : «  Il n’est pas de notre bord. »  Ils y ont vu là, en quelque sorte, usurpation d’identité. ! Et la réponse de Jésus est géniale : « Mais ne l’empêchez pas… » Du moment que quelqu’un fait quelque chose de bien, on se moque pas mal de son étiquette, disciple du Christ ou non. C’est quand même un bel état d’esprit que propose Jésus : Savoir se réjouir gratuitement de tout ce qui se fait et se vit de beau et de bon autour de nous, dans le monde et surtout sans nous ! Un ami prêtre racontait cette semaine comment il avait admiré l’attitude des habitants d’un petit village dont il est le curé. Il donnait beaucoup de détails sur l’attention, le tact, la délicatesse de ces habitants par rapport à une famille du village dont le fils s’était suicidé en prison. Et cela l’amenait à conclure : « Finalement, le monde n’est pas si fichu que cela ! » Mais ce n’est pas si simple de réagir comme cela : on a toujours envie de défendre notre boutique, de montrer que c’est grâce à nous, surtout si on cherche à ce que notre boutique se remplisse, cette gratuité est difficile à garder ! Mais cela permet la solidarité par rapport à tous ceux (de tous bords, croyants ou incroyants) qui travaillent au bonheur des personnes.

La deuxième partie de l’évangile est beaucoup plus déconcertante : Cette histoire de couper la main, le pied ou arracher l’œil s’ils sont occasion de chutes  nous paraît rude et bien sévère ! J’ai compris réellement le sens de ce texte lors d’une rencontre à Lourdes avec le Secours Catholique (certains connaissent déjà cette histoire, vraie bien sûre, j’aime la raconter car elle m’a vraiment éclairé !) . Je me suis retrouvé dans un petit groupe formé de bénévoles, responsables et de personnes accueillies. On nous proposait une réflexion à partir des cartes du jeu de mille bornes : On devait choisir deux cartes et expliquer pourquoi on avait choisi ces deux cartes… Mon esprit critique me fit penser d’abord  que c’était une réflexion un peu bête, parce que chacun allait choisir les cartes les plus importantes ou les plus influentes, telles que : dépanneuse, increvable, feu vert etc… La première personne (qui venait des Antilles) parla la première et choisit : « Vitesse limitée à 50 km/h » et expliqua : « Si on veut que tout le monde avance en même temps, il ne faut pas aller trop vite ! » Cela ne m’a alors paru pas si bête que cela comme réflexion. Mais le sommet cela a été quand Gérard, une personne accueillie venant de Bretagne, nous a dit qu’il a choisi la carte accident et la carte roue de secours. Et il nous a expliqué : « Moi, ma vie, elle a été marquée par de nombreux accidents… Elle est toute cabossée, mais avec une roue de secours, on peut continuer à avancer…. » Grâce à Gérard, je comprends cet évangile : Parfois, nous voulons mener notre vie en restant entier, sans prendre de risques, nous cherchons à demeurer des gens biens, irréprochables, admirables, sans accidents et surtout sans perdre une main, un pied, un œil…  Jésus nous dit : « Mais c’est quand tu es estropié que tu peux rentrer dans le Royaume de Dieu et non pas en voulant rester intact ou intègre. »

J’ai vécu cette semaine une très belle rencontre de personnes  voulant réfléchir dans la Foi sur leur engagement auprès des plus pauvres. Elles étaient huit femmes et ce qui m’a d’abord frappé, c’est qu’elles n’ont jamais mis  en avant leur générosité, leur charité chrétienne ou leur devoir. Mais elles ont  surtout insisté, en donnant des détails, pour reconnaître combien elles ressortaient enrichies de leurs rencontres avec ces personnes en difficulté. Et puis elles ont parlé de leur propre situation avec beaucoup de confiance : En quelque sorte, sans vouloir être vulgaire mais pour reprendre l’évangile, elles ont partagé comment certaines (pratiquement toutes) étaient cabossées : Certaines étaient célibataires, d’autres mariées sans enfant (expliquant pourquoi elles n’avaient pas adopté d’enfants) , d’autres ayant adopté des enfants, d’autres ayant eu des enfants… Il y avait un peu toutes les situations, chacune a pu exposer sa situation et la manière dont elle la vivait, quel sens elle lui donnait,  sans crainte d’être jugée par les autres. Il y a eu une grande écoute respectueuse, une amitié très forte.

Bien sûr ce message de Jésus n’est pas neuf, mais il nous rappelle à chaque instant l’importance de nous reconnaître pécheurs (nous commençons chaque messe en nous reconnaissant pécheurs), ce n’est pas pour nous culpabiliser mais pour nous indiquer que c’est en reconnaissant en nous les même limites que chez les autres que nous pouvons sincèrement les aimer….

Daniel Bertèche