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Homélie du 9 septembre 2018

 HOMELIE   DU  9   SEPTEMBRE      (Jacques 2,1-5. Marc 7, 31-37)

Dans cet évangile nous voilà une fois de plus en présence d’un récit de miracle. Peut-être est-il bon de rappeler que ces récits de miracles ne sont pas là pour que nous admirions la capacité de Jésus à faire justement des miracles… Si le but était là, les évangélistes ne seraient pas entrés dans les détails pour raconter comment se sont passés ces miracles, il aurait suffi de donner le nombre de miracles opérés par Jésus : « Jésus était quelqu’un de très doué : Il a guéri cent cinquante-trois personnes (je dis n’importe quoi) » A la rigueur pour donner plus de force, on aurait pu comptabiliser par catégories de maladies : « Il a guéri tant de sourds, tant d’aveugles, tant de paralysés ou de lépreux… » Cela aurait été bien suffisant si cela avait eu comme unique but comme on nous l’a d’ailleurs appris autrefois au catéchisme, quand il y avait des questions réponses : A la question, Jésus est-il Fils de Dieu, la réponse avait comme conclusion (je m’en rappelle encore !) : « Et il l’a prouvé par ses miracles… » Ce qui est totalement faux, il n’a jamais rien voulu prouver par ses miracles, puisque très souvent (et cela se trouve dans le récit d’aujourd’hui) : « Jésus ordonna de n’en rien dire à personne… »

Et donc ces récits de miracles sont là pour nous délivrer un message, pour nous aider à comprendre et à vivre nos vies et à relire l’action de Jésus sur nous. Car « ce sourd qui a aussi de la difficulté à parler… » C’est chacun et chacune d’entre nous. C’est moi, qui ne sais pas écouter, qui ne sait pas comprendre la vie des autres, qui ai du mal à dire les choses, avec un certain  état d’esprit. J’ai assez souvent des discussions avec des parents (surtout des mamans !) à propos de leurs enfants qui, d’après eux (non sans raisons d’ailleurs) ne regardent pas leur vie à l’endroit, ne font pas les bons choix, se font de faux jugements sur les personnes et surtout s’embarquent dans des galères pas possibles etc… Alors comment ce récit nous éclaire quand nous nous trouvons sourds et ne parlons pas correctement… Souvent face à nos enfants qui ne savent pas voir les choses essentielles, surtout qui n’ont pas le moral, nous pensons qu’il suffit comme le disent les gens de l’évangile que Jésus « pose la main sur eux… » C’est-à-dire qu’une discussion, une réflexion bien argumentée suffisent  à transformer les personnes. L’expérience nous montre assez que le discours (ou le sermon !) ne sert à rien, ne change pas les personnes… Ce serait trop facile. Et c’est là que l’attitude de Jésus nous éclaire : Il pose des actes peu ragoûtants : « Il lui met les doigts dans les oreilles et avec sa salive lui touche la langue… » Ce qui veut dire, ce n’est pas à partir du discours (aseptisé) même religieux que s’opère le changement mais dans la réalité, dans le concret de la vie, (dans la boue de l’existence) à travers des évènements heureux (ou souvent malheureux). C’est la vie qui peut nous transformer, qui nous permet d’entendre et de parler correctement.

Mais alors qui peut nous aider ou nous accompagner dans notre démarche d’entendre mieux et de parler plus correctement. Saint Jacques dans la deuxième lecture nous donne la réponse qui nous bousculera toujours à travers un exemple et la conclusion : « Dieu n’a-t-il pas choisi ceux qui sont pauvres aux yeux du monde pour en faire des riches dans la Foi… » Et il prend pour exemple notre attitude différente dans notre accueil de la personne qui porte un vêtement rutilant et au doigt une bague en or, et un pauvre au vêtement sale. Saint Jacques insiste non sans raison sur le vêtement sale du pauvre, car là aussi le pauvre « aseptisé », c’est-à-dire irréel, ça on veut bien, mais sale, non, il aurait quand même û faire un effort, cela ne coûtait pas plus cher d’être propre. Combien de fois par rapport à certaines personnes je tiens ce discours qui me dispense de me laisser interpeler par les plus pauvres et surtout de voir en eux ceux qui me révèlent quelque chose de Jésus !

Un petit fait pour terminer : Dans un des groupes avec qui  je me retrouve pour réfléchir, il y a quelqu’un qui a du mal à s’exprimer, que de temps en temps on laisse lire pour lui faire plaisir, qui dit très peu de choses au niveau de la réflexion… La dernière fois (suite à ce texte), il déclare : « Monsieur Untel, il n’a pas pu venir au repas de la fête de la paroisse parce qu’il n’a trouvé personne pour l’emmener ! » En l’entendant, immédiatement je me suis dit : « Il veut se faire remarquer en disant quelque chose mais ça n’a rien à voir avec le sujet… » Aussitôt après (et je n’ai pas été le seul dans le groupe) j’ai rétabli la réalité en pensant : « Mais le voilà le pauvre aux vêtements sales qui est le riche dans la Foi… » Sa réaction qui n’avait peut-être rien à voir avec ce que nous étions en train de réfléchir nous renvoie à cet essentiel : Comment des personnes habituellement seules se sentent encore plus isolées au moment d’un évènement que la paroisse veut rassembleur et que l’on a abandonné au bord du chemin…Tout l’évangile est là.

Daniel Bertèche