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Homélie du 6 mai 2018

HOMELIE   DU  6  MAI        (Actes 10,25-26.34-35.44-48. 1 Jean 4,7-10. Jean 15,9-17)

Dans l’Evangile qu’on vient d’entendre,  les mots aimer, amour, ami se trouvent douze fois ;  dans le première lettre de Saint Jean, ces mots reviennent neuf fois…Cela nous rappelle une fois de plus que le cœur de notre Foi chrétienne se situe bien au niveau de l’amour… Un « commandement » bien connu : « Aimez-vous les uns les autres » En ajoutant quelque chose de connu aussi mais qui est très important : « Comme je vous ai aimés.. »
Nous savons par la vie que c’est capital de commencer par se rappeler et expérimenter que nous sommes aimés pour être capables d’aimer à notre tour !
Et Jésus insiste et répète : « Ce n’est pas nous qui avons aimé Dieu le premier, c’est lui qui nous a aimé le premier. Il nous a choisis !»  Et la manière de nous aimer de Jésus est impressionnante : « Je ne vous appelle plus serviteurs ; je vous appelle mes amis ! » On est choisi par lui… Etre choisi, quel beau signe d’amour !
On n’est pas serviteurs, on est amis, on est à égalité avec lui, il ne nous domine pas… C’est aussi un beau signe d’amour.
En conclusion, si je vois l’autre avec les yeux de Jésus, je peux lui donner bien plus que les choses qui lui sont extérieurement nécessaires ; je peux lui donner le regard d’amour dont il a besoin.
Pour y voir concrètement plus clair, il est intéressant de relire le texte des Actes des Apôtres qui nous raconte la vie de la première Eglise : Avant le texte qu’on vient de lire, Luc nous raconte toute la recherche « spirituelle » d’un homme, Corneille, et il nous précise bien : « Un centurion de l’armée romaine… » C’est-à-dire un païen, qui plus est faisant partie de l’armée d’occupation d’Israël : Donc au regard de la religion juive, doublement impur ; en conclusion à ne fréquenter sans aucun prétexte ! Et voilà que Pierre et Corneille ont un songe ; souvent dans la Bible, c’est une réflexion qui amène une conversion pour une plus grande fidélité à la pensée de Dieu. Pour le Centurion, c’est simple, le songe lui trace le portrait-robot de Pierre pour qu’il puisse le reconnaître…. Mais pour Pierre c’est beaucoup plus compliqué : D’une manière symbolique, on lui propose de manger des animaux dont certains dans la religion juive sont considérés comme impurs… En bon juif, Pierre refuse plusieurs fois et une voix lui dit : « De quel droit, au nom de la religion, tu vas décréter que telle viande est impure… » Pierre est très perturbé, quelque part, on lui demande de désobéir à la religion…Et aussitôt après, ce songe  l’invite à se déplacer à Césarée pour rencontrer cet homme impur à ne pas fréquenter…Un peu paumé, il y va.  Et là, Corneille tombe à ses pieds. Et Pierre, le pape, ne l’oublions pas, lui dit cette phrase merveilleuse : « Lève-toi. Je ne suis qu’un homme, moi aussi. » Et c’est cette reconnaissance de son humanité qui va lui permettre de changer du tout au tout son comportement : Pas plus qu’il n’y a d’animaux impurs, il n’y a de personnes impures !  Et il va le dire avec ces mots : « En vérité, je le comprends, Dieu ne fait pas de différence entre les hommes… » Et voilà que l’Esprit Saint descend sur ces personnes païennes alors qu’elles ne sont même pas baptisées, à la grande stupéfaction des croyants d’origine juive qui accompagnaient Pierre. Et Pierre leur dit : « Quelqu’un peut-il refuser l’eau du baptême à ces gens qui ont reçu l’Esprit Saint tout comme nous ? » Quel retournement de leur pensée, de leur conception de la religion, de ce qui est essentiel : Aimer, à l’image de Dieu, c’est supprimer toutes les règles, les lois y compris religieuses, qui nous empêchent de découvrir et d’admirer en toute personne les gestes d’attention, d’amitié pour toute personne sans exception, y compris les personnes les plus inattendues.

Nous avons tous nos centurions de l’armée romaine de qui nous n’attendons rien et que nous pensons sans intérêt : Hier soir, je me suis retrouvé avec un groupe de personnes et au cours du repas, on s’est mis à discuter en petits groupes, ceux qui étaient les plus proches. A un moment donné une femme d’une cinquantaine d’années est venue volontairement intégrer notre groupe (elle était à l’autre bout de la table.). Je la connaissais un peu, mais alors pas du tout comme elle s’est révélée : Elle a parlé longuement de la maladie, des derniers instants et de la mort d’un de ses beaux-frères. Il y avait beaucoup de cœur. Beaucoup de justesse aussi dans la manière dont elle a accompagné cette personne et surtout peut-être sa famille.
Elle a fait ce qu’il fallait sans aller trop loin. J’ai vraiment découvert cette personne, si éloignée de la religion, en apparence, volontiers provocatrice, même déroutante, certaines fois ! Elle a vécu elle-même, elle a su communiquer aux siens (à une de ses filles en particuliers)  un comportement qui était vraiment marqué par un réel amour qui disait Dieu. Mais pour que je la découvre ainsi, il a fallu qu’elle vienne à moi, à travers le groupe et qu’elle me permette de changer de comportement, non pas comme celui qui sait comme c’est si souvent le cas dans des réalités comme celle-là mais comme celui qui se rappelle que : « Je ne suis qu’un homme, moi aussi ! » qui peut admirer…

Daniel Bertèche