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Homélie du 25 février

Pour bien comprendre le sens de ce texte de la Transfiguration de Jésus, il faut d’abord se rappeler à quel moment de la vie de Jésus, cet évènement est censé se passer : Jésus a annoncé  à plusieurs reprises que contrairement à ce que pensaient les apôtres sa mission de Messie ne l’amènerait pas sur les sentiers de la gloire, de la puissance, de l’efficacité, de la domination mais au contraire que son message allait l’amener à souffrir, être incompris, rejeté, condamné et même être mis à mort. Alors bien sûr ils ne comprennent pas, ce n’est pas comme ça qu’ils voyaient les choses ni qu’ils comprenaient l’action de Dieu… Ils se trouvaient même remis en cause dans leur manière de penser Dieu !Aussi cet évènement de la transfiguration va se trouver réalisé devant Pierre, Jacques et Jean qui vont être en première ligne au moment de la Passion de Jésus et donc cela se voulait un éclairage sur l’attitude Jésus et sur son efficacité ! Même si à ce moment-là, cet évènement ne va pas tellement éclairer les trois apôtres qui très vite vont fuir au moment de l’arrestation de Jésus ; l’évangéliste Marc le rapporte pour nous éclairer, nous qui lisons cet évangile. La première chose qui nous est signalée, c’est la blancheur, nous savons que dans la Bible, la blancheur est le signe de Dieu : On nous parle d’hommes en blanc dans l’évangile (et parfois des anges) pour signaler que ces personnages nous parlent au nom de Dieu. Dans les autres évangiles qui rapportent cet évènement, ils nous disent que Jésus étant en prière, son visage devint radieux, rayonnant de bonheur. Et on comprend pourquoi quand Marc nous rapporte la parole du Père que les témoins entendent : « Celui-ci est mon Fils bien aimé : écoutez-le ! » Cette relation d’amour entre le Père et le Fils transfigure inévitablement le visage du Fils. Et nous le savons bien nous-mêmes, quand nous avons la chance de l’expérimenter, rencontrer quelqu’un qui nous écoute, qui est attentif à ce que l’on vit, qui nous donne de l’amitié, qui est « saisi de compassion » (pour reprendre une expression de l’évangile), notre visage devient radieux, rayonne de bonheur.Les deux témoins Moïse et Elie sont aussi là pour nous aider, en pleine vie,  à chercher, découvrir, expérimenter ce visage de Dieu qui nous apporte un bonheur intérieur qui nous transfigure. Moïse, on le connaît bien, c’est l’homme des dix commandements qui sont des invitations à aimer Dieu et son prochain… Mais Elie nous éclaire peut être encore plus, pour rectifier l’idée que nous nous faisons de Dieu et de son efficacité : Un jour, Dieu annonce à Elie qu’il va passer près de lui ; on connaît l’histoire, il y eut un vent violent… Et Dieu n’était pas dans le vent, un tremblement de terre et Dieu n’était pas dans le tremblement de terre, le feu et Dieu n’était pas dans le feu… Enfin il y eut le murmure d’une brise légère et Dieu était dans cette brise légère. Cette réflexion toute symbolique a beaucoup d’importance : D’abord pour nous non plus, il n’est pas évident de penser Dieu dans le murmure d’une brise légère, on le voit beaucoup plus dans le vent et le feu (symboles de la Pentecôte !) symbole de puissance, de force et d’efficacité alors que le murmure d’une brise légère, ça ne change rien à rien. Et pourtant si on sait voir, la vie nous montre que c’est vrai et comme souvent de manière tout à fait inattendue.

Dernièrement, j’attendais quelqu’un qui devait venir pour une préparation au baptême, arrive une personne âgée pour demander des messes. Comme j’attendais quelqu’un qui n’était pas encore arrivée, j’avais le temps. Et on a discuté, je crois d’abord qu’elle était heureuse que je lui donne du temps, elle a répété à plusieurs reprises que ça lui faisait du bien de pouvoir discuter. Et comme les gens du baptême tardaient,  nous avons pu parler pendant plus d’une heure… On a échangé sur le passé, les prêtres trop sévères, une idée de Dieu qui faisait peur etc… Mais ce qui m’a le plus frappé c’est qu’elle qui d’habitude a la dent dure contre certaines personnes (et c’était encore vrai au début de notre conversation), petit à petit s’est assouplie, a essayé de comprendre et a jugé de manière beaucoup moins dure, c’était très étonnant, une certaine bonté émanait d’elle. Je n’ai rien fait pour arriver à ce résultat, surtout je n’ai pas employé l’efficacité du feu, de paroles qui font la morale, redressent les paroles injustes etc… Tout simplement, je l’ai écoutée dans le murmure d’une brise légère  d’une place que je lui ai donnée… Et cette écoute gratuite l’a un peu transformée, c’était vraiment gratuit (ce n’était pas un acte charitable !) car elle a rempli mon attente…Cela m’a tout simplement permis de toucher du doigt l’efficacité de cette brise légère alors que je ne m’y attendais absolument pas. Si je n’avais pas été dans la nécessité d’une attente, je ne lui aurais surement pas accordé tout ce temps à première vue totalement inutile. Mais ce bonheur pour moi, et pour elle aussi, de ce regard tout autre, beaucoup plus compréhensif, totalement  inattendu de ma part, m’a permis de vérifier la vérité de l’évangile !

Daniel Bertèche